La seconde édition du salon « Millésimes Alsace » s’est tenue ce 16 juin 2014 à La Halle aux vins de Colmar. Etant invité par le CIVA et ayant un contingent d’heures de récupération suffisant pour l’événement – le salon se tient un lundi –je me suis donc rendu en terre haut-rhinoise pour passer une belle journée de dégustation.
C’est donc fier comme un poulet avec mon accréditation que je cherche l’entrée du salon. Pas de fléchage, pas de drapeau !! Mais où est donc cette divine entrée ? Ah !! Une Ferrari !! je chauffe….je brule…. j’ai trouvé.
La salle est assez austère et surannée avec des murs rouges, au pays du blanc, avec très peu de signaux pouvant suggérer la vigne, le raisin, le vin. Mais peu importe au fond, la vérité n’est ni dans la déco, encore moins dans le discours mais bien dans le verre. Les exposants sont en rangs d’oignons par ordre alphabétique ce qui provoque certainement quelques effets de strabisme chez les sommeliers venus des 4 coins du monde. Entre Léon et Emile Beyer il n’y a qu’un prénom, la différence entre les deux Dopff et plus subtile, idem pour les Ginglinger avec ou sans suffixe, les Sipp, les Bott…Geyl ou Frères, tous l’un a coté de l’autre !!
J’avais beau avoir préparé ma visite, comment attaquer cette visite et comment retranscrire 7 heures de dégustation ? Selon la méthode la plus logique, par terroirs, grès et granit puis les terroirs plus riche et puissant comme les marnes et les calcaires le tout en essayant de visiter des nouveaux domaines.
J’attaque donc cette journée par Claude Weinzorn et son Domaine de L’Oriel à Niedermorschwihr qui présente un Pinot noir Hommage à Gérard 2009 (issu du Brand) sur la cerise noire, les fruits à noyaux, l’amande. La bouche est souple sur des tannins soyeux et fondus. L’équilibre est agréable malgré une petite chaleur en finale. Bien+. Un riesling Sommerberg 2012 très précis sur l’agrume confit, les fleurs blanches. L’attaque est douce sur une acidité en filigrane. Délicatesse, gourmandise. Bien+.
Direction Meyer Fonné à Katzenthal, une première entorse à ma logique de terroir avec un Riesling Pfoeller 2012 sur muschelkalk. Nez floral, épicé, grillé bien trop jeune. Bouche dense sur une minéralité fine mais sapide. Rien ne dépasse de ce breuvage efficace qui claque en bouche par sa grande présence. Très bien-. Riesling Wineck-Schlossberg 2012, nez très ouvert, avenant sur l’agrume, l’orange. La bouche est large, pleine moyennement grasse sur une grosse matière bien sèche. Très bien+. Riesling Kaefferkopf 2012 au nez très épicé très puissant. Bouche longiligne, plus centrée, élancée tout en étant plus dynamique comme plus rapide et percutante. Très bien+Enfin le riesling Schoenenbourg 2012 au nez plein de jus de fruits jaunes. La bouche présente une puissance noble sur une trame douce et une acidité ferme et affirmée. Très bien+
Poursuite dans les rangs avec les domaines Maurice Schoech à Ammerschwihr. Riesling Kaefferkopf 2012 construit sur la finesse et l’élégance des fleurs blanches qu’il faudra attendre un peu. Bien. Le riesling Kaefferkopf 2007 est bien plus parlant avec un nez expressif, plein sur les fruits jaunes. Une bouche sphérique, aérienne, un milieu croquant et craquant posé avant une finale sèche et sapide. Bien+. Riesling Rangen de Thann 2011. Pierre, touches fumées et grillées au nez. Bouche ample mais gardant de la finesse sur une acidité contenue. Un vin pur et étincelant. Très bien.
On continu la tournée des vins de granit le domaine Paul Blanck à Kientzhzeim. En introduction Philippe propose un Riesling Rosenbourg 2010 un poil austère au nez, plutôt froid se qui contraste avec la verve toujours enjoué du maitre des lieux. La bouche présente une acidité franche, centrée dans un vin sphérique et léger. La finale est sèche et claque. Bien. Le Riesling Schlossberg 2010 qui va suivre est plus sableux au nez, net sur les fleurs. La mise en bouche est franche sur une superbe acidité qui trace tout droit son chemin. Beaucoup de franchise de fermeté et finalement de puissance. Très bien. Je suis un peu moins fan du Riesling Furstentum 2009 sur le caramel au beurre salé. La bouche est ample, grasse avec beaucoup de matière et une acidité puissante et profonde. Bien-. Riche d’une immense oenothèque de vieux millésimes, le domaine Paul Blanck peut servir un riesling Furstentum 1994, autre millésime chaud alsacien, nez de fruits jaunes très net, d’abricot. Bouche grasse, matière puissante à l’image du précédent sur acidité discrète renforçant le coté puissant et massif. Un vin qui 20 ans après sa naissance n’a pas une ride. Très bien.
Pas de granit sans le domaine Albert Boxler à Niedermorschwihr qui est passé dans le peloton de tête de la région. Riesling Sommerberg 2012. Nez pur et net sur les agrumes dans un style tranchant. Bouche soyeuse, aérienne sur une acidité prenante soutenant une minéralité puissante. Très bien. Le Riesling Sommerberg « D » 2012 est plus grillé, plus sage aussi sur les agrumes fins. La bouche est plus ronde, moins percutante sur une acidité prenant plus de largeur. Excellent. Le Riesling Sommerberg « E » 2012 au nez épicé et plutôt floral sur une bouche grasse avec une salinité pointue semble plus ramassé sur lui même comme manquant de définition. Très bien-. Pour finir le riesling Brand « K » 2012 aux accents de poivre sur une bouche grasse, large et massive complète ce beau tableau. Très bien
Et le Bas-Rhin dans tous cela ? Il arrive avec le Domaine Jean-Paul Schmitt à Scherwiller avec une déclinaison de cuvée sur les pentes du Rittersberg. Quelques bulles avec un crémant (60% pinot blanc et 40% pinot noir) ayant prit son temps, passant 4 ans sur lattes pour nous offrir son nez frais et net sur la pomme verte. La bulle est franche pour ce crémant dynamique, plein de vie offrant tout de même une grande digestibilité. Bien+. Série de Rittersberg avec le riesling 2012 « classique » au nez discret mais subtilement parfumé de pêche des vignes. Bouche fraiche, simple pour les beaux jours. Bien. Riesling 2011 « Les pierres blanches » au nez plus épicé et à la bouche assouplie par le millésime sur une acidité discrète. Finale sèche et plaisante qui signe le terroir. Bien+. Riesling 2009 « réserve » né d’une vigne de 74 ans. Nez sur le caramel. Bouche sapide en attaque d’une grande homogénéité avec une bonne tenue mais sans austérité aucune. Bien+. Riesling 2010 « réserve », nez très pur sur les fleurs blanches. Bouche tranchante, vive, plus fine et plus racée que le 2009. Minéralité naissance avec un support tannique. Très bien-. Pour finir le pinot noir 2012 «grande réserve » élevé 13 mois en ½ muid + inox en fin de parcours. Nez marqué par le sureau et les fruits rouges. Bouche élancée sur une trame tannique d’une grande finesse absolument pas entachée par l’élevage qui est d’une grande précision et d’une grande élégance. Très bien+.
Petit tour au Domaine Schoenheitz de Wihr au Val dont je parle souvent. Présentation d’un riesling Linsenberg 1995. Nez un peu old school sur des notes d’hydrocarbure avec des retour grillé. Bouche sapide, sèche sur des touches de résineux, d’encaustique. L’ensemble est gourmand et riche. Très bien-
Arrêt au Domaine Weinbach à Kaysersberg. Bien heureux des les voir ici après le récent drame et la disparition de Laurence Faller. On attaque fort avec un Riesling Schlossberg 2013 au nez exotique de papaye. La bouche est dense, sèche bien assise sur sa matière. Bonne droiture, déjà bon à boire avec une minéralité affirmée. Bien+
Suite du programme avec le riesling Schlossberg Sainte Catherine 2013 au nez plus marqué par les classiques agrumes tout en restant fin. Bouche très sapide sur une acidité franche et nette mais qui ne déborde pas. L’ampleur des vieilles vignes est incontestable dans cette bouteille. Le grand classicisme alsacien qui ne change jamais mais qui à chaque fois me fait dire « Waouh » Excellent. Riesling Schlossberg Sainte Catherine 2011 avec son nez épicé et floral. Bouche ronde sur une salinité sèche une acidité un peu plus juste mais qui reste tout de même bien dessinée même si l’ensemble est plus calme. Bien+. Fin du voyage avec pour changer un gewurztraminer Altenbourg 2010 au nez de fleur en tout genre. La trame est fine, l’acidité faible mais suffisante pour équilibrer le breuvage qui combine élégance et allonge. Très bien+.
Domaine Tempé de Zellenberg pour attaquer les vins des autres terroirs plus complexes. Je vais retenir le riesling Grafenreben 2009 au nez boisé avec encore une fois des notes de caramel au beurre. La bouche est ronde et riche mais reste aérienne malgré son terroir argilo-calcaire. L’acidité est fondue, fine avant une finale plus punchy. Bien+. Gewurztraminer Mambourg 2009 au nez très parfumé de fruits à noyaux. Grosse liqueur en bouche, encore un peu massive pour l’heure mais la race et la puissance du terroir sont bien là. Finale sur les épices. Très bien.
Un autre domaine incontournable du Bas-Rhin selon moi, Mélanie Pfister à Dahlenheim qui nous propose son riesling tradition 2012. Nez de pierre chaude avec des relents fumés. Acidité puissante dans cette mâche sérieuse, du coffre de la présence. Bien+ Riesling Engelberg 2012 pour poursuivre avec son nez, de fleur d’oranger, d’agrume, le tout d’une extrême franchise. Encore une fois une acidité puissante qui traverse la bouche sur son support minéral. Vin sec de grand caractère et de grande table car rien ne semble pouvoir lui faire peur. Très bien+. Riesling Engelberg 2011 aux senteurs de sucre d’orge un peu austère. L’acidité est nette et le millésime plutôt mou semble avoir éviter ce terroir. C’est même tranchant comme l’Engelberg sait le faire. Bien+
Riesling Engelberg 2010, pour clore la dernière trilogie avec un nez plus exotique. Avec un peu plus de bouteille l’acidité semble gagner en délicatesse, c’est pourtant un 2010. Mais quelle puissance ! Très bien+ Riesling Engelberg 1992 pour finir par un vin du « pàpa ». Nez de vieilles fleurs que le temps a délicatement séchées. La bouche est ample, douce, homogène avec une acidité un peu pointue, moins précise qu’aujourd’hui mais le vieillissement est joli. Bien+.
Détour par Barr avant de retourner plein sud avec le domaine Hering. Crémant prestige blanc de noir, 100% pinot noir et 24 mois de lattes avant d’arborer un packaging bien sympathique. Le nez est vineux, la bouche fraiche sur une bulle fine. Un crémant racé pour la table. Bien+. Riesling Kirchberg de Barr 2012 avec des fleurs blanches au nez, une bouche croquante sur une acidité maitrisée qui tire sur le gras des marnes du terroir. Un vin plein de bonne chair. Très bien-. Riesling Kirchberg de Barr 2010, plus discret au nez, plus froid mais plus fin. La bouche est précise, sèche, racée et va droit au but. Un vin sans esbroufe, rigoureux et bien mené. Très bien.
Eguisheim maintenant avec le Domaine Paul Ginglinger. Riesling Pfersigberg Ortel 2012. Ce grand cru est tellement complexe, ou mal découpé, que le domaine a fait deux cuvées en 2012. Le nez est structuré sur la fleur d’oranger avec une touche grillée. La bouche est dense, bien en place, structurée par une acidité mure et pleine. Très bien. Riesling Pfersigberg 2010 au nez également floral. Bouche structurée et tendre, aimable tout dans le retenu et le soyeux et pourtant l’acidité trace tout droit. Très bien-. Riesling Eichberg 2008 au nez marqué par les épices. Bouche ample, juteuse, pierreuse. Un vin stable, comme posé en bouche, puissant et ferme. Excellent.
Dopff au moulin à Riquewihr sur un quatuor de Riesling Schoenenbourg. Un 2012 gourmand plein de fruits jaunes dans un joli jus, fluide et fin à l’acidité pointue. Bien+. Un 2011 plus discret avec sa bouche croquante, un peu juste au niveau de l’acidité mais bien en place. Bien. Un 2010 sur les fruits jaunes, une bouche stricte, franche ample sur une puissance maitrisée. Bien+. Et enfin un 2008 sur des notes fumées et fruits jaunes. Une bouche étroite, qui fil tout droit sans perdre en soyeux. Très bien-
Domaine Muré à Rouffach. Riesling Côte de Rouffach 2012 au nez très jeune encore un peu fermentaire présentant une bouche puissante, saline avec une grosse matière comme on aime en trouver au domaine. Très bien. Riesling Vorbourg Clos Saint Landelin 2012. Nez épicé sur les fruits jaunes, la pêche, le coing. La bouche est enveloppée, dynamique, droite et sèche tout en restant avenante. Très bien+ Riesling Vorbourg Clos Saint Landelin 2010. Nez sur les agrumes. Attaque ample sur une acidité puissante et massive (11,48 g/l en tartrique). La petite rondeur en milieu de bouche est bienvenue. Grand vin minéral de grande garde qu’il faudra savoir attendre. Attention dans 20 ans !!! Très bien+ Riesling Vorbourg Clos Saint Landelin 2002. Nez évolué sur l’encaustique, les épices douces. Bouche riche, moins évoluée sur une acidité enrobée mais bien présente. Bien+.
La Cave de Ribeauvillé qui en plus d’être la plus vieille cave coopérative de France est certainement une des meilleurs. Riesling Terroir 2012. Nez frais sur les fruits rouges, la fraise. Bouche dense, friande, gourmande et très ferme. Un peu plus qu’un simple riesling, une belle signature de la cave. Très bien- Riesling Osterberg 2010. Nez grillé et discret. Grosse tension en bouche accompagnée d’une belle matière mure et ample. Bien+ Riesling Osterberg 2008. Nez évolué sur l’encaustique. Acidité franche, très franche même et l’ensemble est plus longiligne. Mais l’évolution est rapide. Bien.
Enfin, pour finir car il est 17h00, Domaine Trimbach à Ribeauvillé. Riesling Réserve 2011. Nez assez discret et réduit. Bouche sèche, droite mais un peu austère. Bien. Riesling Frédéric Emile 1990. Nez très mur sur les fruits jaunes avec quelques touches d’hydrocarbure. La bouche est ample, matière riche et généreuse avec une puissance toute maitrisé. Un riesling restant soyeux. Excellent. Riesling Clos Sainte Hune 2009. Nez floral avec quelques fruits confits. La bouche est dense, massive, saline sur une très belle structure avec une acidité dans la masse, dans le gras du vin. Très grande et fine amertume sur la finale. Excellent.
Je suis également passé gouter les vin de Pierre Gassmann du domaine Rolly Gassmann mais je n’ai pas eu le temps de prendre des notes car submergé par les explications géologiques de Pierre. Signalons juste deux grandes réussites, Riesling Silberberg 2010 et Riesling Pflaenzerreben 2000. Tous les deux sont en ventes en ce moment. Je n’ai par contre pas trouvé les mots pour les vins du Domaine Zind-Humbrecht, rien compris, trop peu dans le verre, des vins tempérés voire chauds…..Trop compliqué pour un salon, une autre fois.
Et bien voilà et comme il fallait s’en douter je n’ai pas visiter le moindre nouveau domaine, faut bien saluer les connaissances, les amis, les vignerons membres du club de dégustation. Enfin si j’ai rendu visite à un nouveau domaine que je vais maintenant pérenniser dans mes circuits de dégustations et bientôt dans ma cave. Le domaine Jean-Paul Schmitt à Scherwiller.
Autres grands noms de la région dont j’ai zappé le stand par faute de temps.
Jean-Baptiste Adam, Barmes-Buecher, Emile Beyer, Léon Beyer, Bott-Geyl, Marcel Deiss, Josmeyer ; Kientzler, Albert Mann, Frédéric Mochel, Schlumberger, Schoffit, Louis Sipp, Stoeffler, Valentin Zusslin.
Concernant le salon, réunir le sommet d’une région est un défit, en cela il est relevé. Par contre, aucun stand pour acheter un sandwich même à 12 euros et je n’ai entendu aucune annonce signalant les deux intéressantes masterclass organisées dans le cadre du salon.
Stéphane