Enfin une nouvelle soirée de l’œnothèque Alsace et pas des moindre et pour une fois la salle est pleine, ça fait plaisir à voir, autant de gens passionnés par la découverte de ce cépage très aimé pour son croquant mais méconnu dans sa version la plus aboutie, un cépage révélateur de terroir.
Amuse bouche, soupe froide de petits pois à la menthe.
Muscat réserve 2009 – Léon Beyer : Nez jeune, fermentaire sur la bière s’ouvrant sur des notes florales et de bonbon. La bouche est ronde, friande avec une tension moyenne. Simple, sec mais croquant, sans excès, efficace. Belle entrée en matière avec un muscat de soif, bien fait, sans défaut. 14.5/20
Muscat Ottonel 2004 – Barmès-Buecher : Nez un poil vieux mais complexe, sur la menthe sèche, la rose, le zan. La bouche est beaucoup plus dense, droite et profonde que le précédent. Sec avec une amertume un peu en avant. Aromatique en finale. Ce muscat est agréable en bouche mais les aromes sont franchement vieillissants. Un muscat Ottonel très spéciale. 14/20
Déclinaison autour de l’asperge.
Muscat 2008 – Ginglinger-Fix : Cuvée à 98% Ottonel et affichant 0.3 g de SR. Nez sur les fruits rouges acidulés, le cassis, la groseille avec un fond de crème anglaise, le tout étant très élégant. La bouche est austère, strict, longiligne et droite mais est un peu juste sur les plats. Un beau muscat en dégustation pure ou sur les dés de saumon fumé. Issue pour partie du grand cru Hatschbourg. 16.5/20 et coup de cœur.
Muscat grand cru Kirchberg de Barr 2008 – Domaine Klipfel : Nez massif sur les fruits jaunes. La bouche est large, avec une toute petite pointe de gaz. L’ensemble est charnu avec une acidité bien centrée. Cuvée puissante qui est beaucoup plus à l’aise sur le plat. Finale longue et ample. Beau retour de Klipfel dans mes carnets. 16/20
La lotte vapeur, nage de langoustine et herbes printanières.
Muscat grand cru Kirchberg de Ribeauvillé 1985 – André Kientzler : Nez sur la menthe et le chocolat, façon after eight. La bouche est ample, généreuse, profonde avec sur cette bouteille une toute petite rondeur. Le vin est aromatiquement très généreux et écrase littéralement la lotte qui aura besoin de la nage pour refaire surface. Troisième fois que je goute cette cuvée et cette bouteille est particulièrement en forme. Un beau vin de terroir, d’une grande maison dans une belle année. 16.5/20
Muscat réserve Cuvée Altenberg 1969 – Gustave Lorentz : Nez pas très en forme à l’ouverture avec des traces d’évolution et de moisie. Sans disparaître on voit rapidement arriver des notes de chocolat, de menthe fraiche mais aussi de caoutchouc. L’autre table a eu le privilège d’avoir une bouteille en bien meilleur forme alors qu’elles ont passé 40 ans une à coté de l’autre dans la cave du domaine. Encore une histoire de bouchon. La bouche et plus fraiche que le nez, puissante, large sur la menthe avec une grande homogénéité et un fondu parfait. Vin complet avec un petit moelleux en milieu de parcours et une forte minéralité. Notes de cassis en finale, signe de la jeunesse de cette cuvée immortelle. 18.5/20 en tenant compte de la seconde bouteille de l’autre table.
L’agneau de lait des Pyrénées, jus à l’ail des ours, carottes confites et petits légumes à la mélisse.
Muscat grand cru goldert 1991 – Zind-Humbrecht : Nez marqué par des touches de pétrole, de mélisse, de menthe. La bouche est douce, marquée par un peu de botrytis. L’acidité est bien en place gardant le coté soyeux jusqu’à la finale. Grand muscat de la grande maison ZH. 17.5/20
Muscat grand cru goldert 1990 – Zind-Humbrecht : Nez complexe, très jeune sur les noisette et autres fruits secs. La bouche est plus riche, mais aussi plus fine, plus élégante et d’une belle définition. Un vin avec une année de plus mais dans un registre complètement différent, plus d’élégance, de finesse mais moins de classe que le 91. 17/20
Muscat grand cru Altenberg de Bergbieten 1988 – Frédéric Mochel : 100% Ottonel. Nez plus austère, sur la pierre, le silex. Petite pointe de gaz en attaque. La structure est profonde, dense, fortement saline comme ciselée par la pierre. Beaucoup de puissance et de race dans ce vin très frais. Superbe. Des trois, mon cœur va vers le bas-rhinois, clairement et sans équivoque. 18/20
L’accord muscat et viande n’est pas là mais ces trois bouteilles sont superbes.
Les fromages affinés par Jacky Quesnot.
Muscat tradition 2008 – Hugel et fils : Nez jeune, frais et bouche légère. Grand bof !! Alors là, le choc est rude, très rude.
Muscat cuvée Exceptionnelle 1967 – Bott Frère : Nez sur le cuir, le sous-bois, les champignons. Bouche aérienne en dentelle avec encore une belle structure. Une bouteille pour plus de 20 personnes, un fond de verre donc. Un muscat subtil. 16.5/20
Muscat 1962 – Léon Beyer : Nez sur les fleurs sèches et les feuilles dans le même état plus du cuir. La bouche est sapide avec une profondeur moyenne. Un peu plus en forme que le 67 mais loin du 69. Ouch !! Encore une cartouche des anciens alsaciens !! Quel bonheur !! 17/20
La soupe de fraise à la menthe et poivre noir, au jus balsamique vieux.
Muscat grand cru Brand vendanges tardives 2001 – Domaine Hurst : Nez sur la banane, les fruits blancs, l’écorce d’agrume, la mirabelle. L’acidité est marquée en bouche mais la douceur du breuvage équilibre bien l’ensemble. Amer et réglisse clôture la bouche. Bien sans plus. 15/20
Muscat clos saint Landelin 2002 – René Muré : Nez dans un registre complètement différent avec des notes de pralin, de safran et des incursions fumées. Plus simple et plus massif en bouche, plus calcaire dans un style rustique, serré et un poil chaud, plus sauvage. 15.5/20
Muscat Sélection de grains nobles 2008 – Cave de Ribeauvillé : La cuvée mystère de la soirée car non identifiée sur le menu. Cette cuvée est issue d’un tri hyper sévère dans les vignes des coopérateurs de la cave. Résultat, une cuvée de 80 litres à la senteur de mirabelle, de biscuit avec une volatile assez forte en perception et pourtant dans les clous de la mention. La bouche est jeune, volumineuse et très grasse. Une belle aventure que ce vin, merci Evelyne pour ce cadeau au nom de la cave. 16.5/20
Mes conclusions sont les suivantes….
1-Le riesling est le grand cépage d’Alsace mais il faut toujours un second au maitre. Aucun vieux pinot gris ne m’a jamais arraché une larme, le gewurztraminer est trop exclusif en terme d’association avec la cuisine. Le sylvaner et le pinot blanc trop marginaux sur les grands terroirs, encore que certaines cuvées commencent à ressortir doucement des caves. Reste le muscat !! Et si nous tenions là, le second du riesling. Un registre aromatique franc, des équilibres assez identiques et une longue garde comme j’ai pu le constater depuis longtemps. Un cépage polymorphe comme peu en France, qui peut s’exprimer dans tous les registres, sec, ½ sec, moelleux, liquoreux. Il est aussi capable d’être mauvais donc à choisir avec discernement.
2-La capacité exceptionnelle de vieillissement des plus belles cuvées de la région. En 6 ans, j’ai croisé des alsaces des millésimes 42, 43, 45, 47, 51, 52, 53, 59, 61, 64, 68, 69 (liste non exhaustive que je vais enrichir un jour) et à chaque fois je fais le même constat. Pourquoi les vignerons alsaciens et le Civa, s’obstinent à conseiller la consommation de leurs vins dans leurs jeunes années ?! A les entendre, 10 ans est un grand maximum, et encore, pour le riesling grand cru uniquement. On peut donc se demander combien de vigneron ont gouté comme nous des bouteilles de plus de 50 ans parfaitement conservées ? Peu, très peu je suppose.
Stéphane