1985 a vu disparaître Philippe de Dieuleveult, Marc Chagall, Orson Welles, Simone Signoret et naitre M.Pokora, Shy’m et Stromae……………. mais aussi Michael Phelps, Lewis Hamilton ou encore Nico Rosberg, l’honneur est sauf même si la succession artistique n’est pas forcement au rendez vous.
1985 est également un des grands millésimes des années ’80. Souvent dans l’ombre de 1983 en Alsace, 1982 dans le Bordelais ou 1989 un peu partout en France il n’en reste pas moins un grand millésime.
Nous allons donc profiter de son 30ème anniversaire pour vérifier si la légende qui veut que les grands millésimes soient des années de gardes se confirme.
Voilà donc une petite sélection de vins provenant de caves des membres ou encore de ventes aux enchères voire d’un caviste qui s’est bien sucré sur notre dos pour une des bouteilles.
Dégustation à l’aveugle le 19/10/2015 club AOC de Barr.
Saint Aubin Le Charmois 1985 Domaine Marc Morey.
Robe dorée. Nez sur le beurre frais, les fleurs, la menthe, l’abricot mûr, des touches torréfiées, de la cire. L’évolution est correcte. L’attaque en bouche est franche avec une forte présence d’alcool et une acidité présente mais ciselée. L’ensemble est assez simple avec de la largeur mais point de relief ou de profondeur. Finale courte. Ne démérite pas. A noter l’absence de mention 1er cru sur l’étiquette, ce qui est le cas de nos jours sur ce climat. 14/20
Grand cru Pfingstberg Riesling 1985 Domaine Lucien Albrecht.
Robe or. Nez frais et vivant sur la réglisse, l’anis, le camphre avec des touches fumées et un fond d’écorce d’orange et de beurre très frais. La bouche est ample, minérale, fortement sapide avec une acidité puissante qui traverse le breuvage. Beaucoup de corps, de présence pour ce vin au caractère trempé et racé. Longue finale. Jamais je n’ai gouté un Pfingstberg à ce niveau !! 17,5/20
Jurançon 1985 Clos Joliette.
Robe or foncé. Nez manquant de netteté avec des accents terreux, du sous-bois, du cuir, de la croute de pain et de la truffe. Bouche dans un équilibre demi sec avec une acidité pointue mais dans la masse. L’ensemble est assez lisse, monolithique et ne provoque pas la moindre excitation autour de la table. 12/20 pour cette bouteille sortie récemment des caves du domaine.
Beaune 1er cru Le Clos des Mouches 1985 Domaine F.Gaunoux.
Robe claire, tuilée. Nez très évolué sur le chocolat, la quetsche, la cerise à l’eau de vie. La bouche est fine, très fine, trop fine pour ce vin décharné, acidulé sur des tannins encore assez agréable et n’asséchant pas la bouche. L’ensemble est fatigué mais pas totalement inintéressant. 12/20 pour cette bouteille.
Saint Emilion grand cru classé B Château La Gaffelière 1985.
Robe soutenue à peine évoluer. Nez végétal, un rien animal sur des fruits noirs, du poivron très mûr, de la réglisse le tout dans une ambiance un peu brulée, torréfiée. Bouche fluide sur des petits tannins fermes avec une acidité maitrisée pour évoluer sur un coté démonstratif, dynamique ample et une belle balance. La finale est généreuse, peut être un peu asséchante. Voilà un vin encore bien jeune qui va vivre encore 20 ans. 15,5/20
Graves Château Carbonnieux 1985.
Robe très sombre digne d’un perdreau de l’année. Le nez est étriqué sur le cassis et la myrtille avec du bois noble et du sang frais. La bouche est charnue en attaque puis un peu plus simple par la suite pour s’étirer dans la longueur avec des tannins gras qui ne dominent pas le caractère un peu strict de l’ensemble aidé par des touches minérales un peu carrées. Un vin qui ne fait absolument pas son âge mais qui manque un peu d’éclat et de charme. 14,5/20
Margaux Bel air-Marquis d’Aligre Grand cru exceptionnel 1985.
Robe rouge profond. Nez sur le sang de bœuf, la cerise griotte en mode confiture avec une pointe de volatile. La bouche est ferme sur des tannins précis assez marqués mais relativement gras. Un margaux qui curieusement joue des épaules dans un style carré avec ses senteurs sudistes de VDN sur base de grenache, de laurier et de sauge. Finale un poil asséchante. 14/20
Châteauneuf du Pape 1985 Domaine Saint Préfert.
Robe tuilée. Nez curieux sur le plastique, le cuir, les fruits secs et les épices. La bouche est ample et juteuse, chaude sur des tannins ciselés et puissants. Un vin énergique, démonstratif et riche juste entaché par un caractère un peu brouillon.
Bouteille proposée au club par notre regretté Francis O. qui nous a brutalement quitté cet été. Merci Francis pour tous ces moments. 15/20
Gewurztraminer cave vinicole de Dambach la Ville 1985 Wolfberger.
Robe brillante. Nez net et classique sur la rose fanée et les épices. La bouche est riche, d’un niveau demi sec avec un petit moelleux, enveloppant le palais sur des notes de cire, de beurre et une corbeille de fruits. L’acidité est un peu juste et n’arrive pas à dynamiser l’ensemble qui reste sage et simple sur cette petite matière. Finale un peu courte mais vin plus que buvable, propre et ayant parfaitement passé les années. 13/20
Grand cru Goldert gewurztraminer 1985 Cave de Pfaffenheim.
Nez très exotique ou l’on trouve tous les fruits, passion, goyave, mangue avec des touches plus complexes et épicées. La bouche est souple, suave et douce dans un style lisse, délicat et des sucres fondus. Ce gewurztraminer ne va pas chercher les grands fonds mais ne dévalorise de loin pas la région. 14/20
Vouvray moelleux 1985 Domaine du Clos Naudin-Foreau.
Nez sur le plastique, les fruits blancs très nets comme la poire, la pomme sucrée et encore la mie de pain fraiche. Belle liqueur en bouche, fine, droite, très précise dans une grande fraicheur sans pour autant dominer le breuvage. Je suis là mais on ne me sent pas. Vin extrêmement digeste, propre, en place sans le moindre défaut. 18/20
Bonnezeaux 1985 Château de Fesles.
Nez sur la chaussette de deux jours, et quelques discrets fruits. Bouche sur des notes de caramel dans un style large mais lisse sur une belle richesse sucrée. Bonne fraicheur même si un peu trop lactée. Encore jeune mais manque de complexité. 14/20
Sauternes 1er cru Classé 1985 Château de la Tour Blanche.
Robe vieil or. Nez fermentaire sur les fruits jaunes et les épices. Bouche moelleuse, de largeur moyenne sur une acidité compact et une grosse masse de sucre. Vin sur la réserve un peu lourd maquant d’éclat et de définition malgré une belle amertume. Pas le grand millésime de Sauternes avec un manque de botrytis. 15/20
Arbois Vin Jaune 1985 André et Mireille Tissot.
Robe jeune, jaune pale. Nez sur le cuir, la noix fraiche, le classique curry. La bouche est fine, longue et droite et d’une grande race. Un jaune juteux qui prend les papilles dans la largeur avec une grosse acidité. Avant le fils il y avait les parents, une ancienne histoire qui continue aujourd’hui. 17,5/20
Première règle pour les vieux millésimes, ils ne sont pas forcement chers et même sans chercher des heures sur la toile on trouve un Carbonnieux 1985 à 19 euros, un Vouvray moelleux de Foreau 1985 à 48 euros et dans les 30 euros pour une La Gaffelière 1985. Même un Beaune clos des Mouches un peu fatigué se trouve à 15 euros.
Excepté les étiquettes prestigieuses il n’y a pas de raison de payer 100 euros pour un vin de 30 ans voire même de 50. D’ailleurs avec la hausse constante des derniers millésimes, boire vieux et même moins cher de nos jours ! Un comble, payer moins cher pour ne pas avoir à attendre ses bouteilles.
Alors, un vin peut-il vieillir ou doit-il vieillir ? Et bien c’est comme le fût du canon, ça dépend. Le Châteauneuf du Pape devait être bien trop costaud jeune, le Beaune bien plus vivant, le Carbonnieux déjà fermé et l’Arbois Vin Jaune au même stade d’évolution. De cette série, seul le Saint Aubin n’a rien gagné à être attendu 30 ans, il devait être bien meilleur il y a 15 ans.
Si le signe distinctif d’un grand vin est sa capacité à se bonifier avec la garde alors le Vouvray de Foreau et le Pfingstberg de Lucien Albrecht entrent dans cette catégorie. Mais un vin plus simple peut également vieillir sans rien perdre comme ce gewurztraminer de Wolfberger ou ce Bel Air Marquis d’Aligre qui sans rien y perdre n’a pas prit son envole vers les sommets après 30 ans d’attente.
Mais faire vieillir un vin sans en connaître sa capacité à braver les années reste un risque et il faut souvent choisir entre boire un vin trop tôt ou trop tard en l’imaginant dans les deux cas à son apogée dans votre verre. Il n’y a que l’expérience des uns et des autres et votre propre goût qui peut vous aiguiller dans ce choix.
Stéphane